23 novembre 2011

Mediapart - Oser l'habitat participatif

Mediapart - Oser l'habitat participatif

René Dutrey, conseiller de Paris (EELV), et Jean-Yves Mano, adjoint (PS) au maire de Paris en charge du logement, demandent un changement du «cadre législatif et règlementaire» pour favoriser le développement de l'habitat participatif, synonyme selon eux d'«autogestion» et d'«éloignement des logiques spéculatives».

Et si l'habitat participatif, appelé également habitat groupé ou coopératif, était en train de devenir, en pleine crise du logement, un nouveau moyen d'habiter?
Particulièrement présentes dans les pays nordiques, l'autopromotion et les coopératives d'habitants se développent chaque jour davantage en France. Cette nouvelle forme d'habitat collectif repose sur une définition, une conception et une gestion communes qui placent les habitants au cœur du projet. Dans sa forme la plus simple, des personnes souhaitent acquérir un logement et participer ensemble à sa création. Elles réfléchissent à son agencement, son dispositif énergétique ou son organisation générale, et définissent des lieux de vie à partager avec les voisins comme une buanderie, une salle commune, un atelier, une cuisine ou encore un jardin.
Le concept est astucieux, audacieux même, car déclinable selon les aspirations et les moyens des groupes constitués. Il permet de créer un cadre de vie plus appréciable, de proposer une alternative sociale et sociétale au choix entre la promotion immobilière privée ou le logement social, avec toujours à cœur de perpétuer le principe de l'autogestion et l'éloignement des logiques spéculatives.
Chaque groupe a donc son identité propre, et sa taille varie en fonction des affinités, des projets, et naturellement des terrains disponibles et du prix du foncier. Ainsi, un projet d'habitat groupé peut compter par exemple de quatre à trente foyers propriétaires ou locataires avec une mutualisation d'espaces variable.
Au Danemark, comme en Allemagne, le regroupement coopératif de centaines de logements et d'activités a permis de redéfinir l'aménagement urbain. En France, de nombreux projets sont en cours. Parmi les plus aboutis, citons ceux de Grenoble, Villeurbanne, Lille, Strasbourg. Malgré un prix du foncier très élevé, l'Ile-de-France s'engage également sur cette voie, comme les projets de Montreuil et le Grand portail de Nanterre l'attestent, ce dernier étant exemplaire à bien des égards. En effet, pour soutenir ce projet, la ville de Nanterre a choisi de proposer aux occupants de son parc social la possibilité de rejoindre un projet d'habitat participatif. L'appel à candidatures a été particulièrement fructueux: un groupe d'habitant s'est constitué, le permis de construire est déposé et les travaux s'apprêtent à commencer. Une fois de plus, la preuve est faite que ce type de projet est viable, y compris au sein des zones où le foncier est rare et cher!
Mais ne nous leurrons pas: le développement de l'habitat participatif à l'échelle du pays ne peut reposer sur les seules épaules des bonnes volontés locales. Le cadre législatif et réglementaire doit changer. En effet, la disparition du statut de coopérative d'habitant au début des années 1970 a eu pour conséquence d'imposer l'utilisation de formes juridiques diverses et peu adéquates: association, coopérative, société civile immobilière. Il est temps d'ouvrir la voie à une réforme à même de favoriser le développement de ce mouvement. D'ailleurs, en novembre 2010, les collectivités territoriales ont été associées pour la première fois, aux cinquièmes Rencontres nationales de l'habitat participatif  à Strasbourg, démontrant l'intérêt des pouvoirs publics locaux pour cette nouvelle forme de promotion de l'habitat et les enjeux et les possibilités que présage cet investissement. A ce titre, le premier réseau national des collectivités sur l'habitat participatif, regroupant techniciens, chargés de missions et élus locaux a été créé.
Paris a choisi de rejoindre ce mouvement en inscrivant dans son programme local de l'habitat, en novembre 2010, le développement de l'habitat participatif. Malgré un contexte foncier difficile, elle saura mobiliser les opportunités nécessaires à la réalisation de cet objectif, en mobilisant ses terrains ou ceux de ses bailleurs, à Paris ou en périphérie. Puisqu'il s'agit d'aides publiques à des projets privés, la ville de Paris les encadrera par des clauses anti-spéculatives et l'accès se fera sous conditions de ressources.
Accompagner, encourager, aider: voici les attentes des acteurs vis-à-vis des élus et des collectivités. Ces nouvelles formes d'habiter audacieuses portent en elles les fondements d'une véritable politique publique en matière de logement, et participent même parfois aux projets qui incombent à la politique de la ville. Il est encore temps pour les collectivités d'agir: saisissons l'occasion!

A retrouver sur le site de Mediapart en cliquant ici

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