23 octobre 2009

Le Conseil de Paris se penche sur le problème de la "location contre service"


20.10.09

"Homme, 49 ans, propose à jeune femme colocation dans charmant petit studio. Pas de loyer, votre bonne humeur, compagnie et petits services feront l'affaire." Cet exemple d'annonce illustre le "voeu" relatif à la lutte contre la "location contre faveurs" que René Dutrey, conseiller (Verts) de Paris et président de l'Association départementale d'information sur le logement (ADIL) de Paris, devait soumettre au Conseil de Paris, lundi 19 octobre. M. Dutrey, au nom du groupe des Verts, demande que la Ville de Paris mène une étude sur l'ampleur du phénomène et que la préfecture de police mette en oeuvre un plan d'action pour enrayer la multiplication des annonces abusives.

L'ADIL pointe "les jeudis de la colocation", un rendez-vous organisé par les sites Colocation.fr, Kel-koloc.com et Easycoloc.com, qui, selon l'association, "attire certaines personnes qui entendent lier l'utile à l'agréable en proposant ouvertement une location gratuite contre faveurs". Frédéric de Bourguet, fondateur de Colocation.fr, s'en défend : "C'est un fantasme. Je reconnais que nous ne sommes pas à l'abri de personnes mal intentionnées, mais si jamais quelqu'un se comportait mal, je pense que l'on aurait une remontée immédiate. En huit ans, aucun participant ne s'est plaint de propositions indécentes au cours de ces soirées." Quant aux annonces publiées sur son site, il assure que les offres douteuses restent marginales : "Depuis sa création, on n'a eu affaire qu'une seule fois à une personne malsaine, fétichiste des pieds."

"Amitié amoureuse"

Même discours chez Appartager.com. "Ça représente moins de 1 % de nos annonces. Car 100 % d'entre elles sont vérifiées par notre équipe de cinq modérateurs qui travaillent à temps complet pour contrôler l'identité de l'annonceur et ses coordonnées, en se méfiant des offres anormalement peu élevées", assure son responsable, Karim Goudiaby. Des filtres ont également été placés sur certains mots-clés comme "services sexuels", et une liste noire créée. Enfin, les utilisateurs eux-mêmes ont la possibilité de signaler les annonces qui leur paraissent suspectes, ce qui les bloque automatiquement.

Ces systèmes de modération ne sont pas imparables. Kristin (les noms ont été changés), étudiante allemande de 18 ans, a failli en faire les frais. "L'autre jour, j'ai répondu à un homme d'une trentaine d'années qui proposait une chambre dans son appartement parisien, raconte-t-elle. Quand j'ai demandé si je pouvais visiter, il m'a dit que je devais d'abord le convaincre. Comme je ne comprenais pas, il a ajouté : "Par exemple, la jeune fille de ce matin, elle a fait un strip-tease pour me convaincre, tu dois faire aussi bien."" Sophie, 22 ans, étudiante à Sciences Po, a vécu récemment une expérience similaire : "C'était un jeune homme qui offrait une colocation gratuite. Il m'a expliqué qu'il n'avait aucun problème d'argent, mais que ce qu'il recherchait, c'était plutôt une amitié amoureuse avec une fille."

Pour Yannick Pons, fondateur du site de petites annonces gratuites Vivastreet.fr, le problème vient surtout de la quantité d'offres postées (un million d'annonces actives en France toutes catégories confondues). "Je reconnais qu'on a longtemps été plus préoccupés par les arnaques financères ou le trafic de voitures, et que la colocation n'était pas une priorité. Mais nous sommes en train d'y remédier, promet-il. Les termes "services" et "gratuit" seront désormais filtrés en ce qui concerne les annonces de colocation".

Elisabeth Pineau
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