22 octobre 2009

Intervention au conseil de Paris - Contre les tours aux Batignolles, pour un écoquartier!

M. René DUTREY. - Merci, Monsieur le Maire.

J'aimerais que l'assemblée imagine ce que pourra être le futur quartier des Batignolles, une tour de 130 mètres accueillant un tribunal, placée devant une grande esplanade minérale, entourée de 8 à 10 barres de plus de 50 mètres de logements sociaux coincées entre un faisceau ferroviaire et différentes activités nuisantes.

Je dirai à cet urbanisme-là que c'est face à cet urbanisme que le mouvement écologiste, dans les années soixante-dix, s'est élevé, s'est constitué, dans des centaines d'associations de quartier, pour dire que cet urbanisme était anachronique, était d'un autre temps et qu'il fallait passer à autre chose.

Le quartier des Batignolles aurait dû être un éco-quartier. Je dis "aurait dû être", car, premièrement, je le disais en termes de forme urbaine, cela va ressembler plus à un urbanisme des années soixante-dix qu’à un éco-quartier. Deuxièmement, une tour ne pourra jamais être écologique ; le groupe Les Verts le répète depuis maintenant plusieurs années.

Je répète les raisons principales.

Premièrement, en matière d'éco-construction, il y a un principe de base qui est que la surface en contact avec l'extérieur doit être la plus petite possible par rapport à la surface en contact avec le sol, c'est une question de forme urbaine, et la tour est exactement le contraire de cette forme qui correspond à l’éco-construction.

Deuxièmement, une tour oblige à employer des matériaux extrêmement solides pour pouvoir construire en hauteur, de l'acier et du béton. L'acier et le béton sont deux matériaux absolument anti-écologiques.

Troisièmement, la hauteur entraîne une surconsommation du fait des ascenseurs, du fait des fluides, du fait des chauffages. Cette surconsommation n'est absolument pas récupérable et mettre des panneaux solaires sur une tour, c’est l’équivalent de mettre des panneaux solaires sur un 4x4, c'est-à-dire que vous vous avez un objet surconsommateur et vous allez difficilement tenter d’atteindre un bilan correct.

Alors, ce bilan, bien sûr, en mélangeant des carottes, des poireaux et des choux - pour reprendre une expression employée hier -, on arrive en moyenne certainement aux objectifs du Plan climat, mais les objectifs du Plan climat et du Grenelle sont clairs : nous parlons d'énergies primaires aux bâtiments, nous ne parlons pas de moyennes entre les bâtiments. Et c'est bien ce qui risque de se passer aux Batignolles.

Donc, ce quartier aura une forme urbaine qui correspond plus à un urbanisme des années 1970. Ce quartier ne sera pas un éco-quartier.

Après, l'enjeu principal pour Paris : tenter de maintenir la sociologie parisienne qui aurait dû être, à notre avis, un des grands projets portés par la gauche depuis 2001. Pas la mixité sociale ! Maintenir la sociologie parisienne aujourd'hui.

Alors là, cette tour, ce tribunal, manque de chance ! Il est tombé exactement où étaient les logements sociaux. On aurait pu penser que l'importante part de bureaux soit réduite, ces bureaux qui servent d'écran antibruit face au faisceau ferroviaire. On aurait pu prendre sur la part de bureaux. Et non, on a pris sur la part de logement social. Et là, je dirais que mairie du 17e a gagné. On peut dire, bien sûr, de mettre en scène une espèce de caricature "la droite est réellement contre le logement social et la gauche est pour".

Mais, aux Batignolles, que se passe-t-il ?

Il se passe ce qu’il se passe à peu près sur le reste de Paris. C’est que les arbitrages ont entraîné une très grosse proportion de bureaux, un tribunal important et nous allons entasser - je dis bien "entasser" - les logements sociaux et les besoins publics sur les derniers terrains qui vont rester. Entasser en montant jusqu'à 50 mètres.

C'est l'image de ce qu’il se passe exactement au niveau parisien. Nous considérons que le P.L.U. a abandonné Paris à la spéculation et que nous nous retrouverons avec les derniers terrains aménageables dans lesquels nous sommes obligés "d'entasser" pour répondre aux besoins publics. Ce n'est absolument pas le projet sur lequel nous avions été élus, ce projet plein d'espoir, en 2001, porté par toutes ces luttes associatives. Ce n'est pas l'urbanisme que nous imaginions, l'urbanisme effectivement compact de l'éco-quartier.

Aujourd'hui, en France, qui construit des bâtiments de 50 mètres de logements sociaux ?

En cherchant, je n'ai peut-être pas trouvé, mais regardons les mêmes problématiques que nous : à Lyon, à Marseille, on trouve beaucoup de bâtiments de grande hauteur de standing, mais très peu, et à ma connaissance pas du tout, de barres de 50 mètres de logement.

Si plus personne ne le fait, si, quand vous vous promenez en Ile-de-France, vous ne repérez que des opérations de quatre, cinq, six étages relativement compacts… Je ne parle pas de l’ennemi, l'étalement urbain, le pavillonnaire, je parle de toutes ces opérations qui se réalisent en ce moment, compactes, à quatre, cinq, six étages et qui devraient être un modèle d'éco-construction.

Toute la France s'engage dans cette voie et, Paris, nous faisons des tours et des barres !

Pour finir - cela, c’est l'apogée -, ce quartier va accueillir de très nombreux habitants. Ce quartier va rassembler l'ensemble des tribunaux d'instance de Paris et je suis très étonné du vœu du Parti communiste, demandant à sauver les tribunaux d'instance, alors qu'au dernier Conseil de Paris, il y a eu un vote unanime, U.M.P., P.C., P.S., pour rassembler les tribunaux d'instance dans la Z.A.C. "Batignolles". Ce rassemblement des tribunaux d'instance va entraîner de très forts déplacements : certainement 6 à 7.000 personnes par jour.

Alors, en plus d'un quartier de barres et de tours, en plus d’un quartier coincé, en plus d’un quartier où on entasse les besoins sociaux, eh bien, ce quartier ne sera pas desservi par les transports en commun, car le tramway ne sera pas prolongé à temps jusqu'à la porte d'Asnières.

La station de métro des Batignolles pour aller au tribunal d’instance, la justice de proximité, celle qui était dans votre quartier, ce sera quoi ? Brochant ? La ligne 13, le matin, où il faut attendre cinq métros pour passer ?
M. René DUTREY. - Je conclus. Je crois avoir très bien résumé ce que risque d'être les Batignolles demain. C'est pourquoi, dans l'état actuel, le groupe "Les Verts" ne votera pas cette délibération.

M. René DUTREY. - Très rapidement, trois conditions qui auraient pu amener le groupe "Les Verts" à voter cette délibération.

La première, que ce soit un écoquartier, pas une contrainte. Et là, je dirai que l’intervention de M. CAFFET est absolument parfaite : il faut se libérer des contraintes avec une vision globale... En gros, il faut s’asseoir sur le plan climat ! Il nous le dit clairement. La loi Grenelle, qui va être, entre autres, mise en œuvre…

Monsieur CAFFET, vous ne m’interrompez pas ! Vous nous le faites à chaque fois ! J'interviens : vous êtes en train de m'interrompre ; cela ne se fait pas ! Je vous demande d’arrêter ce genre de processus, merci !

M. René DUTREY. - Pouvez-vous me laisser parler, Monsieur CAFFET, s’il vous plaît ? Vous nous donnez régulièrement des leçons et là, vous m'interrompez.

Premièrement, cela se calcule à la parcelle en énergie primaire. C'est l'objet du plan climat, du Grenelle de l'Environnement et effectivement, sur ces bancs de l’assemblée, on entend exactement le contraire.

Je ne sais pas si vous n'avez pas d'oreilles, si vous ne lisez pas la loi, mais cela se calcule à la parcelle, en énergie primaire, et votre vision globale, c'est tout simplement assumer que Batignolles ne sera pas un éco-quartier.

Deuxième condition, si ce quartier avait donné la priorité clairement au logement…, aujourd'hui, depuis la 8e Commission, je tente, difficilement, d’avoir les chiffres d'équilibre entre les différentes fonctions. Je ne m'étendrai pas là-dessus parce que je suis président de commission et je n’arrive pas à avoir les données malgré un mail complètement… - je ne dirai rien - que j'ai reçu ce week-end.

Ce qui est sûr, c'est que dans ce quartier aujourd'hui, il y a une priorité claire donnée aux bureaux qui étaient déjà prévus, additionné au tribunal d'instance, et que la priorité n’est pas donnée au logement.

Donc, vous pouvez bouger le curseur de 5 % entre le logement privé et le logement social pour agiter la droite : tout cela n'est que mise en scène, la priorité au logement n'est pas donnée aux Batignolles.

Dernier point : la fermeture des tribunaux d’instance et l’attitude absolument schizophrène du parti communiste, qui vote au dernier conseil la convention État-Ville fermant les tribunaux d'instance, fermant la justice de proximité et aujourd’hui, qui dépose un vœu pour sauver les tribunaux d'instance.

Je crois que le parti communiste, aujourd’hui, est effectivement une force d’accompagnement, mais absolument plus de transformation, et c'est bien dommage. Il y avait des injustices à défendre, mais je crois vous estimez que ce n’est plus votre rôle. Peut-être que la hauteur nous permettra de développer un fonds de commerce sur la défense des ascenseurs : il y a effectivement une niche.

Bonne chance, Monsieur le président. ! Je vous remercie.

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